Ringardisées par la digitalisation des rencontres amoureuses, les agences matrimoniales résistent à la concurrence. À Genève, l’agence Unicis tire profit des faiblesses du Web pour proposer une offre plus sécurisée et surtout personnalisée
Rossana et Carla n’ont rien de «marieuses has been». Ces deux Italiennes issues du monde de la finance respirent l’épanouissement personnel. Elles disent travailler dans une agence de rencontre, et non «une agence matrimoniale». Le charme de leur accent est assumé. Rossana commence: «Nous voulions investir dans le domaine de l’humain.» Carla termine: «Faire quelque chose pour notre bien-être aussi.» Un bel exemple de «matching». Sur l’ordinateur de Rossana justement, la «matching table» d’Excel arbore des couleurs différentes en fonction des membres de l’agence. Un «match» suppose une complémentarité parfaite entre deux clients.
Rossana, malgré son sourire permanent, admet être sous pression: « Nous rencontrons en moyenne trois à quatre personnes par jour. Et on doit gérer l’emploi du temps de nos 350 membres. C’est un vrai métier, avec des responsabilités. » La responsabilité? Chercher, et surtout trouver, l’amour pour un client. Pourtant, l’agence Unicis n’a pas d’obligation de résultat: « L’amour ne se commande pas! Nous aidons simplement le hasard, c’est notre slogan », nous dit Carla. « Notre engagement est de présenter des gens avec un profil adéquat. Les rencontres sont très ciblées. » Dans les agences de rencontres, le client va confier un mandat pour un service, tandis que les sites en ligne proposent des bases de données.
Les deux associées, perfectionnistes, soignent chaque détail, jusqu’au mobilier de leur agence genevoise. « L’intérieur a été pensé avec un psychologue pour que nos membres se sentent à l’aise et en confiance. » Rossana et Carla sont établies à Genève depuis deux ans. « Dans la région, la demande est très forte. Nous mettons en relation des gens habitant en Suisse et en France voisine. » Les membres de l’agence correspondent à trois tranches d’âge: « Les jeunes, dès 26 ans, recherchent un compagnon de vie. Puis nous avons les 35-45 ans, souvent divorcés. Et enfin, les seniors, qui sont les plus sympathiques. Ils ne sont pas stressés par leur horloge biologique! Ils veulent seulement partager les petits bonheurs de la vie avec quelqu’un. »
C’est même une obsession! Nos membres demandent presque toujours des personnes plus jeunes.
Surconnectées, elles ont su profiter de l’avènement numérique, tout en conservant l’identité de l’agence de rencontres traditionnelle. « Unicis existe depuis quarante-trois ans. Nous sommes donc une agence ancienne qui profite des moyens modernes. Nous utilisons beaucoup les réseaux sociaux. Mais nous travaillons sans photos! Nous offrons un descriptif physique bien sûr, mais surtout du caractère. » Un choix qui surprend les nouveaux clients.
Pour Rossana, le physique prend une place trop importante dans le choix du partenaire idéal. « Les femmes sont très portées sur l’apparence. Elles regardent les cheveux, les dents, la propreté des mains. Si l’homme n’est pas rasé, elles considèrent que le rendez-vous est pris à la légère.» L’âge est aussi un critère prépondérant. « C’est même une obsession! Nos membres demandent presque toujours des personnes plus jeunes. Un monsieur de 60 ans souhaitait rencontrer une jeune femme de 35 ans. Mais là, on refuse! » Ces demandes incongrues restent fréquentes, et depuis peu un nouveau type d’appels fait sourire les deux Italiennes: « Des messieurs nous demandent s’ils peuvent « nous aider »... Nous n’avons pas tout de suite compris, mais ce sont des gigolos. »